Assurance de prêt : le marché reste verrouillé par les banques.

Difficile pour elles de renoncer à un marché estimé à 6 milliards dont plus de 70% représentés par les cotisations de la garantie décès. Après 3 années d'application, la loi Lagarde n'a pas entraîné d'évolution dans la hiérarchie des distributeurs d'assurance de prêt : les banques trustent toujours les premières places.

Monopole des banques
Avant l'entrée en vigueur de la loi Lagarde, les banques avaient le quasi monopole de l'assurance de prêt. Depuis septembre 2010, les choses n'ont pas évolué : les banques dominent toujours le marché. A l'exception de CNP Assurances (toutefois détenue à plus de 35% par une filiale de La Banque Postale et de BPCE), les 9 premiers vendeurs d'assurance emprunteurs sont des filiales de groupes bancaires, Crédit Agricole, Crédit Mutuel et BNP Paribas en tête, représentant à eux seuls près de 60% des cotisations versées. Aucun assureur indépendant dans la liste.

Les raisons de ce verrouillage sont connues. Malgré la possibilité donnée à l'emprunteur de choisir librement son assurance de prêt, la loi Lagarde n'a pas restreint le champ d'action des banques. Les imprécisions du texte rendent la loi inefficace et permettent aux banques de conserver la mainmise sur le marché en jouant sur les mots, notamment à propos de l'équivalence des garanties. Seule l'intervention d'un courtier peut faciliter la souscription d'une assurance déléguée grâce à son pouvoir de négociation avec les banques.

Liberté de choix, une notion théorique
Un appel à témoins lancé par l'association UFC-Que Choisir durant l'été dernier est éloquent. Sur les 105 témoignages recueillis, 64,5% concernent une demande de substitution d'assurance pour un crédit en cours, le reste une demande de délégation pour un nouveau contrat. Dans le premier cas de figure, 28% ont réussi leur délégation après plusieurs mois de négociation. Le refus n'est pas toujours justifié (13,5%), il l'est à 15% pour non-équivalence (même à garanties supérieures) et à 53,5% pour cause de non-droit (la substitution en cours de prêt ne serait pas autorisée selon les banques). Pour les nouveaux crédits, la hausse des taux (56,7%) et le jeu des délais (32,4%) représentent les deux difficultés majeures vécues par les emprunteurs. Et si la délégation aboutie, des frais de délégation sont facturés dans 16,2% des cas.

Renforcer la loi
Cette enquête montre que la déliaison entre crédit immobilier et assurance reste théorique. Malgré la loi Lagarde, les contrats alternatifs n'ont pas progressé. Ils représentaient 20% des ventes d'assurance de prêt en 2009, ils n'étaient plus que 14% en 2011. La loi de régulation bancaire votée en juin dernier renforce les dispositions de la loi Lagarde en introduisant 3 contraintes pour les banques : mise en place du taux annuel effectif assurance pour améliorer la comparaison du prix des assurances de prêt ; interdiction des frais de délégation et délai d'acception ou de refus motivé réduit à 10 jours ouvrés. En revanche, le législateur ne s'est pas prononcé quant à la possibilité de résiliation annuelle d'un contrat d'assurance de prêt, seule mesure capable de libéraliser le marché.



Audrey Benzaquen

Par , le lundi 25 novembre 2013

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