Assurance de prêt : pouvez-vous récupérer les bénéfices de votre assurance de prêt ?

Francesco Romanello,

En saisissant il y a deux ans le Conseil d'Etat à propos de l'assurance de prêt, l'UFC-Que Choisir s'est mise à dos banquiers et assureurs. Une démarche qui a permis de déclarer illégal un arrêté qui stipulait que les assurances collectives en cas de décès, en l'occurrence les assurances de prêt souscrites auprès des banques, ne pouvaient donner droit à la participation aux bénéfices techniques et financiers. Cela aurait du enclencher des versements aux assurés, mais la partie, plus complexe qu'elle n'y paraît, n'est toujours pas gagnée.

Selon l'article L.331-3 du Code des Assurances en vigueur le 1er juillet 1994, "les entreprises d'assurance sur la vie ou de capitalisation doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu'elles réalisent, dans les conditions fixées par arrêté du ministre de l'Economie et des Finances". Dans cet arrêté, les assurances de prêt, qui servent à garantir la bonne fin d'un crédit immobilier, sont exclues du dispositif. Le 23 juillet 2012, le Conseil d'Etat jugeait illégal l'arrêté suite à l'action menée par l'association UFC-Que Choisir. A priori, à compter de cette décision, les assurés-emprunteurs disposaient d'un délai de deux ans (jusqu'au 23 juillet 2014) pour réclamer les sommes dues, à savoir une part des bénéfices techniques et financiers des assurances pour lesquelles le risque couvert ne s'est jamais réalisé. Une personne qui aurait emprunté 300 000€ sur 15 ans pourrait estimer récupérer 2 000€ de surprimes.

Aucune somme n'a à ce jour été versée aux emprunteurs, les assureurs, aidés de l'avis de l'ACPR (autorité de contrôle prudentiel et de résolution), prétextant le caractère collectif des assurances souscrites auprès des banques. En clair, un emprunteur ne peut faire valoir une somme précise sur un produit, à savoir le contrat groupe, négocié pour l'ensemble de la communauté des emprunteurs, qui n'est donc pas assorti d'un droit individuel à participation aux bénéfices. Assureurs et banquiers mettent également en avant le fait que l'assurance de prêt est une assurance dommages et ne relève donc pas de l'assurance vie et capitalisation régie par l'article L.331-3 du Code des Assurances. Dont acte.

L'histoire ne se termine pas là. Le site actioncivile.com a décidé de poursuivre le combat en proposant aux emprunteurs ayant souscrit une assurance de prêt entre 1996 et 2007 (le 27 avril 2007 précisément, date de l'arrêté qui modifie les obligations en matière de répartition de la participation aux bénéfices) d'entamer une procédure collective. Il a recueilli à ce jour plus de 45 000 plaintes d'assurés. Les inscriptions seront clôturées le 23 juillet prochain, conformément au délai précisé par le Conseil d'Etat il y a deux ans. L'échéance est donc proche pour faire valoir son droit, mais le problème est tout autre : les décrets d'application des "class actions" à la française seront publiés seulement en fin d'année 2014. Si le site actioncivile.com a peu de chance de voir sa démarche aboutir, il parviendra peut-être à pousser les banques à la médiation face tant de plaignants.