Assurance vie : les assureurs remettent en cause le délai de renonciation.

Francesco Romanello,

Alors qu'est attendu dans les prochains jours le rapport Berger/Lefebvre sur l'épargne longue, les assureurs réclament en catimini un allégement des règles d'information en matière d'assurance vie et un raccourcissement du délai de renonciation pour les souscripteurs. Véritable garde-fou contre d'éventuels contournements de la loi par les assureurs, cette obligation d'information garantit la protection des consommateurs. Assouplir la loi reviendrait à affranchir les assureurs de leur devoir d'informer les assurés.

Que dit la loi ?
Selon les articles L.132-5-1 et L.132-5-2 du Code des Assurances, le souscripteur d'un contrat d'assurance vie ou de capitalisation peut dénoncer son contrat par lettre recommandée avec AR pendant un délai de 30 jours calendaires à compter :
- du premier versement pour les contrats conclus avant le 01 mars 2006 ;
- du moment où le contrat est signé pour les contrats conclus à partir du 01 mars 2006.
Au préalable, l'assureur a obligation de respecter son devoir de conseil et d'information avant la signature du contrat et, dans un deuxième temps, de remettre une proposition de contrat incluant une lettre de renonciation, ainsi qu'une note d'information reprenant toutes les caractéristiques du contrat.
Le défaut de la part de l'assureur entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation jusqu'au 30ème jour suivant la date de remise effective des documents conformes :
- sans limitation pour les contrats conclus avant le 01 mars 2006 ;
- dans la limite de 8 ans pour les contrats conclus à partir du 01 mars 2006.
L'assureur a obligation de restituer l'intégralité des sommes investies et supporte sur ses fonds propres l'éventuelle perte en capital subie par le contrat renoncé.

Que réclament les assureurs ?
Plusieurs assureurs, notamment la société Axa, soutiennent que cette faculté de renonciation prorogée, qu'ils considèrent comme une sanction à leur égard, porte atteinte à leurs biens et viole une des règles de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ("Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.").
Les assureurs voudraient tout particulièrement limiter le risque systémique lié au délai de renonciation qu'ils encourent sur les unités de compte. Selon Nicolas Moreau, président d'Axa, "tout évènement affectant la valeur des unités de compte est susceptible de déclencher des demandes massives de renonciation, au détriment de la solvabilité des compagnies d'assurance". Il souhaiterait qu'une réforme soit engagée pour limiter ce risque, ainsi que les obligations d'information à l'égard des épargnants. Du côté de la FFSA, on assure ne pas vouloir remettre en cause cette faculté de renonciation, mais plutôt modifier les règles pour éviter les pratiques de mauvaise foi.
Dans les affaires de justice entre assurés et assureurs concernant l'obligation contractuelle des seconds, il est régulièrement jugé que l'assureur est libre de délivrer à l'assuré toutes les données indispensables à la parfaite information de ce dernier et de se mettre ainsi à l'abri de toute renonciation.