Le président de la Mutualité Française Etienne Caniard ne baisse pas les bras. Il continue de fustiger les modalités d'application de la généralisation de la complémentaire santé et pointe un conflit d'intérêts qui favorise les institutions de prévoyance. L'amendement qui instaure les clauses de recommandation vient malheureusement compliquer son action, le gouvernement étant persuadé que qu'elles sont la condition préalable au principe de mutualisation.
Clauses de recommandation
Pour contourner l'invalidation par le Conseil Constitutionnel de l'article L.912-1 du code de la Sécurité Sociale qui autorise les clauses de désignation des contrats collectifs de santé et de prévoyance par les branches professionnelles, le gouvernement a fait voter un amendement qui instaure par une réécriture les clauses de "recommandation". Les accords de branche pourraient donc, à compter du 1er janvier 2014, recommander un ou plusieurs organismes assureurs "instituant des garanties collectives présentant un degré élevé de solidarité". La recommandation devra être précédée d'une "procédure de mise en concurrence des organismes, dans des conditions de transparence, d'impartialité et d'égalité de traitement entre les candidats et selon les modalités prévues par décret". Le texte prévoit en outre que l'entreprise couverte par un accord de branche comportant une clause de recommandation sera assujettie au forfait social majoré si elle choisit de souscrire un contrat auprès d'un autre assureur que le ou les organismes recommandés. Celles qui souhaiteraient exercer leur liberté de choix seraient donc taxées à 8% pour celles qui sont aujourd'hui exonérées (moins de 10 salariés) et à 20% au lieu de 8% pour les autres.
Les institutions de prévoyance en position de force
Les recommandations selon accords de branche sont établies par les partenaires sociaux, ceux-là même qui gèrent les institutions de prévoyance. Un conflit d'intérêts dénoncé par le président de la Mutualité Française Etienne Caniard. Sans vouloir faire un procès d'intention, il doute que "la vertu soit suffisante pour se prémunir contre les choix qui peuvent servir les intérêts des uns et des autres". Selon lui, les négociations au niveau des branches professionnelles ne feront pas forcément baisser les tarifs, contrairement à ce que soutient la ministre de la Santé Marisol Touraine pour qui les clauses de recommandation conditionnent le principe de mutualisation. Le choix d'un opérateur unique par branche sur l'ensemble du territoire aurait plutôt pour effet d'entretenir l'inflation des coûts, et Etienne Caniard de rappeler le système des vases communicants quand on élève les tarifs là où les prix des soins sont les plus bas pour faciliter un meilleur accès là où ils sont plus chers. Avant de défendre ses parts de marché, la Mutualité Française souligne un enjeu d'intérêt général pour l'avenir de la protection sociale et pour l'accès aux soins.
Comme en avril dernier avec les clauses de désignation, le Sénat a rejeté mercredi 13 novembre le texte sur les clauses de recommandation avec sanctions fiscales à la clef. Le parcours législatif de l'article incriminé se poursuit donc, le gouvernement est bien décidé à ne pas renoncer aux clauses de recommandation.