Mutuelle santé entreprise : le gouvernement veut orienter le choix des mutuelles collectives.

Audrey Benzaquen,

La polémique sur les clauses de désignation ne désenfle pas. Dans le cadre de la mise en place de la généralisation de la complémentaire à tous les salariés, le gouvernement choisit la manière forte pour obliger les entreprises à adhérer au contrat désigné par leur branche. Il entend pour cela utiliser le forfait social et agir sur le taux de ce prélèvement pour soumettre les entreprises. La liberté de choix n'est pas bridée, elle est simplement pénalisée fiscalement.

Le gouvernement entérine sa décision par amendement au projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS). La manoeuvre a pour but de contourner la censure du Conseil Constitutionnel qui a estimé en juin dernier que les clauses de désignation étaient une entrave à la liberté d'entreprendre et de contractualiser. Les sociétés qui choisiront une autre complémentaire santé que celle désignée par leur branche subiront une augmentation du forfait social. Les couvertures prévoyance et santé collectives sont aujourd'hui soumises au forfait social de 8% ; pour les entreprises frondeuses, le prélèvement monterait à 20%, soit le taux appliqué sur les éléments de rémunération non assujettis aux cotisations de Sécu (comme l'intéressement, la participation, l'abondement aux plans d'épargne salariale). Le gouvernement a tenu à préciser que les "entreprises couvertes par l'accord conservent la possibilité de choisir un autre organisme assureur, mais elles se voient appliquer un taux majoré de forfait social sur les contributions qu'elles versent à cet organisme". A quel prix !

Pour défendre leur décision, les ministères de la Santé et du Travail assurent que ce dispositif va permettre de maintenir un haut niveau de solidarité et faciliter la mise en place des meilleures garanties pour tous les salariés, notamment à l'intérieur des plus petites entreprises. Il y a désormais une distorsion entre un prétendu élargissement de la mutualisation et la liberté de contractualiser.

Le coup est rude pour les assureurs et la grande majorité des mutuelles. Depuis l'accord national interprofessionnel de janvier, ils pointent du doigt la main mise des institutions de prévoyance sur le marché de la complémentaire santé collective. Les clauses de désignation permettent en effet à ces organismes cogérés par les syndicats et le patronat d'être privilégiés. L'ultime recours voudrait que le Conseil Constitutionnel invalide cette obligation juridique d'adopter le prestataire choisi par la branche professionnelle.