Assurance emprunteur : quid de la participation aux bénéfices.

Citons en préambule l'article L.331-3 du Code des Assurances : "les entreprises d'assurance sur la vie ou de capitalisation doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu'elles réalisent, dans les conditions fixées par arrêté du ministre de l'Economie et des Finances." Toujours selon le Code des Assurances, ces entreprises doivent distribuer au minimum 90% de leurs bénéfices techniques (bénéfices de gestion) et 85% de leurs bénéfices financiers (bénéfices de placement). Cela paraît très clair pour les compagnies d'assurance vie qui versent une part importante de ces bénéfices aux assurés, part qui s'ajoute au taux minimum garanti fixé par le contrat et qui représente une portion significative du rendement global. Qu'en est-il des assurances de prêt soumises à la même règle ?

Depuis le 1er mai 2007, un emprunteur ayant contracté une assurance de prêt peut réclamer sa participation aux bénéfices techniques et financiers. Cela vaut pour tout type de crédit, crédit à la consommation, crédit auto, crédit immobilier, dès lors qu'il est assorti d'une assurance de prêt avec la garantie décès-invalidité. Dans les faits, les emprunteurs-assurés ayant reçu leur participation sont très peu nombreux. L'immense majorité ignore cette règle, et les organismes de crédit et les assureurs "oublient" leurs clients. L'entrée en vigueur de la loi Lagarde sur la délégation d'assurance n'a modifié en rien cette obligation donnée aux banques et aux assurances individuelles.

Comme il est difficile d'estimer le risque dans le cadre d'une assurance de prêt, la prime est surévaluée. En compensation de cette sursaturation, à la fin de chaque année civile, les assureurs doivent reverser aux seuls assurés le surplus dégagé après paiement des sinistres, des frais de gestion et d'administration. L'UFC-Que Choisir estime que les contrats d'assurance emprunteur retirent un surplus d'environ 40% des primes collectées, proportion qui monte à 70% pour les crédits à la consommation. Dans la pratique, les assureurs versent bien la participation aux bénéfices aux établissements souscripteurs des contrats groupe, mais ces derniers ne restituent pas les sommes aux seuls bénéficiaires désignés par la loi. Le problème reste le même pour les assurances déléguées.

Quelques élus ont alerté les pouvoirs publics sur cet abus qui échappe encore à la communauté des assurés et demandé au gouvernement d'assurer l'exécution régulière de l'article L.331-3. La réponse du ministère de l'Economie et des Finances fut limpide : "l'entreprise d'assurance est libre, sauf disposition contractuelle particulière, de déterminer les modalités ainsi que la liste des contrats bénéficiant de la participation aux bénéfices définie réglementairement. Seuls les termes particuliers du contrat peuvent donc, le cas échéant, en application de l'article L.132.5 du Code des Assurances, déterminer des obligations de participation aux bénéfices à l'égard du souscripteur à ce contrat." Le ministère laisse donc les tribunaux se prononcer sur ces litiges qui opposent les banques, les compagnies d'assurance et les associations de consommateurs. Des actions en justice ont été entamées par l'association UFC-Que Choisir durant l'année 2007. Elles sont toujours en cours.

Nul n'est sensé ignorer la loi, cela vaut pour les devoirs comme pour les droits. Vous pouvez réclamer votre participation aux bénéfices techniques et financiers à votre banque ou à votre assureur en lui envoyant un courrier (lettre-type sur le net). Difficile d'estimer votre bénéfice personnel, car il n'existe aucun outil permettant de le calculer sauf si vous avez contracté une assurance auprès de la CNP ou un crédit immobilier auprès de la Caisse d'Epargne.



Francesco Romanello

Par , le lundi 16 juillet 2012

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