Notre-Dame de Paris : l'incendie est-il couvert par les assurances ?

Notre-Dame de Paris : l'incendie est-il couvert par les assurances ?

L'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris lundi 15 avril dernier a provoqué un émoi considérable dans tout le pays et au-delà des frontières. De nombreuses questions émergent après ce deuil patrimonial. Comment était assuré ce monument emblématique de la capitale et de la France ? Quelles sont les responsabilités des entreprises en charge des travaux ? 

La cathédrale n'était pas assurée

La cathédrale Notre-Dame est la propriété de l'État français depuis la loi de séparation de l’Église et de l'État de 1905. Pour la grande majorité des monuments historiques dont il est propriétaire, et en l’occurrence pour les établissements religieux construits après 1905, l'État français est son propre assureur, ce qui signifie tout bonnement qu'il n'y a pas d'assurance. La restauration de la cathédrale, que les assureurs évaluent largement à plus d'un milliard d'euros, est donc du ressort des finances publiques. 

Le recours de l'État à l'auto-assurance pour son patrimoine date de la fin du XIXe siècle. En 1889, le ministre des Finances de l'époque décida que l'État n'assurerait plus ses biens contre l'incendie et serait alors responsable financièrement des dommages occasionnés. Le rapport coût-bénéfice était alors jugé défavorable et il le serait toujours si le Trésor Public devait payer les primes d'assurance de tous les monuments historiques propriétés de l'État (environ 1 300 soit 3% du nombre total des monuments sur le territoire national). Pour l'État, il semble plus avantageux d'assumer le coût des réparations.

En revanche, l'intérieur de la cathédrale et les biens qui s'y trouvent relèvent de la responsabilité des autorités religieuses qui peuvent recourir aux assurances quand elles le peuvent.

L'assurance des œuvres d'art et des reliques

La Mutuelle Saint-Christophe est l'assureur de l'association diocésaine de Paris, propriétaire d'une partie des œuvres d'art, l'autre partie étant la propriété de plusieurs associations qui ont souscrit un contrat d'assurance...ou qui préfèrent s'auto-assurer pour ne pas faire étalage de leurs richesses. Axa Art, filiale de l'assureur dédiée aux œuvres d'art, sera mise à contribution au titre de l'assurance des objets liturgiques et de certaines reliques. D'après les premières estimations, entre 5% et 10% des œuvres d'art auraient été endommagées ou détruites. Plusieurs niveaux de couverture sont possibles en fonction de la politique de gestion du risque et de la stratégie de protection des œuvres décidée par les propriétaires. Une œuvre peut être assurée sur la base de la valeur à dire d'expert ou seulement en réparation. Mais pour des biens irremplaçables et donc inestimables comme les reliques de Notre-Dame (Sainte Couronne d'épines, fragment du bois de la Croix, clou de la Passion), il n'existe aucune assurance. Elles ont fort heureusement été épargnées par le sinistre. 

Interrogé par l'AFP, le diocèse de Paris n'était pas en mesure de répondre sur la couverture des biens et des œuvres présents à l'intérieur de la cathédrale au moment de l'incendie.

La responsabilité des entreprises intervenant sur le chantier

Face au traumatisme national que représente l'incendie de Notre-Dame, le ministre de la Culture Franck Riester a affirmé dès le lendemain que "l'État fera ce qu'il faut". Si le problème de l'assurance apparaît aujourd'hui secondaire quand on voit le succès de la grande collecte nationale en quelques jours (environ un milliard d'euros), la question de la participation des assureurs reste posée. Qu'en est-il de la responsabilité des 5 entreprises qui intervenaient sur le chantier ? Alors que l'enquête visant à déterminer les causes du sinistre n'en est qu'aux prémices, les suspicions se portent sur deux d'entre elles, Le Bras Frères et sa filiale Europe Échafaudage, en charge du colossal échafaudage de 500 tonnes, toujours dressé après les longues heures de brasier. Ces deux sociétés sont assurées en responsabilité civile par Axa France. Si l'enquête venait à démontrer la faute d'une entreprise présente sur le chantier, son assureur devra indemniser au titre de la garantie dommages aux existants. Cette couverture est néanmoins plafonnée au plus à 2 millions d'euros, c'est-à-dire bien peu au regard de l'enjeu financier de cette reconstruction.



Hervé Labatut

Par , le mercredi 24 avril 2019

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