Dépendance : une loi Grand Âge pour la fin 2019

Dépendance : une loi Grand Âge pour la fin 2019

Le rapport Libault relatif au Grand Âge a été remis à la ministre de la Santé Agnès Buzyn ce jeudi 28 mars. L'objectif de cette vaste concertation de six mois qui s'est achevée courant février est d'avancer des propositions de réforme dans la perspective d'un projet de loi qui sera présenté en octobre prochain.

175 propositions pour réformer la prise en charge des personnes dépendantes

Dominique Libault, ancien directeur de la Sécu et actuel président du Haut conseil du financement de la protection sociale, a été chargé par le gouvernement en septembre 2018 de conduire une concertation nationale portant sur le Grand Âge et l'Autonomie. Celle-ci s'est traduite par une vaste consultation citoyenne qui a rassemblé plus de 400 000 participants, par une centaine de rencontres bilatérales et de nombreux groupes d'expressions de personnes âgées, de professionnels et d'aidants. A l'issue de cette mission, Dominique Libault a remis à Agnès Buzyn un rapport touffu de 228 pages, contenant pas moins de 175 propositions pour une politique nouvelle du grand âge en France. Le sujet central de ce document est bien évidemment le financement de la dépendance, au fonctionnement kafkaïen, bien insuffisant, et surtout promis à une croissance exponentielle compte tenu de l'allongement de la durée de vie. 

Les 10 propositions clefs du rapport sur le grand âge


  1. la création d'un guichet unique pour les personnes dépendantes et les aidants dans chaque département ;
  2. une baisse du reste à charge mensuel de 300€ en établissement pour les personnes gagnant entre 1 000 et 1 600€ par mois ;
  3. l'indemnisation du congé du proche aidant, conjuguée à une négociation dans les branches professionnelles pour mieux concilier vie professionnelle et rôle d'aidant ;
  4. un plan national pour les métiers du grand âge permettant d'augmenter les effectifs et d'améliorer les compétences à travers une politique de formation et le développement de perspectives de carrière ;
  5. un soutien financier de 550 millions d'euros pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile ;
  6. une augmentation de 25% du taux d'encadrement dans les Ehpad d'ici 2024 (par rapport à 2015), soit 80 000 postes supplémentaires ;
  7. un plan de rénovation de 3 Md€ sur 10 ans pour les Ehpad et les résidences autonomie ;
  8. un budget de 300 M€ par an pour renforcer l'intégration entre domicile et établissement ;
  9. une mobilisation nationale pour la prévention de la perte d'autonomie, avec, notamment, la mise en place de rendez-vous de prévention pour les populations fragiles ;
  10. la mobilisation du futur SNU (Service National Universel) pour rompre l'isolement des personnes âgées et favoriser les liens intergénérationnels.


L'épineux financement de la dépendance

Le gouvernement n'envisage pas de créer d'impôt supplémentaire pour financer la dépendance. Il devra dès lors utiliser les prélèvements existants qu'il conviendra d'affecter différemment. Une des pistes de financement est de récupérer les recettes de la Cades (Caisse d'amortissement de la dette sociale), ce qui aurait pour impact de dégrader le déficit public de 0,9 point, ce qui mettrait le pays en infraction avec la doctrine de Maastricht. Une autre idée consiste à mobiliser le patrimoine immobilier des personnes dépendantes ; cela pourrait faire baisser à 10% la proportion de 60-69 ans incapables d'assumer un reste à charge médian en Ehpad (1 850€/mois) pendant 3 ans. Actuellement, 60% de cette tranche d'âge sont dans cette incapacité. Le rapport suggère également de développer le prêt viager hypothécaire labellisé "dépendance" ou encore le viager mutualisé avec des investisseurs institutionnels qui achètent plusieurs logements en viager.

De ce rapport, il ressort un consensus clairement exprimé : le budget de la dépendance devra augmenter et sans attendre. Il faudra entre 11 et 25 milliards d'euros de plus pour la dépendance en 2030, et entre 30 et 53 milliards en 2060. En 2014, ce budget totalisait plus de 30 milliards d'euros, répartis entre les soins (12,2 Md€), la prise en charge médico-sociale notamment avec l'allocation personnalisée d'autonomie (10,7 Md€) et les frais d'hébergement (7,1 Md€), en grande partie assumés par les familles.



Hervé Labatut

Par , le vendredi 29 mars 2019

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