Assurance vie : les épargnants contre une réforme de la taxation.

Après les compagnies d'assurance, c'est au tour des épargnants de montrer leur désaccord face à un durcissement probable de la fiscalité de l'assurance vie. Les assureurs utilisent désormais l'opinion publique pour étayer leurs arguments et démontrer que les épargnants préfèreraient renoncer à leur placement plutôt que subir une taxation plus lourde.

Pour compenser la suppression de l'ISF, l'Etat envisage de modifier la fiscalité de l'assurance vie, position que les assureurs ont immédiatement dénoncée au motif d'un déséquilibre patent préjudiciable à l'économie. Après avoir abandonné l'idée de taxer les plus-values latentes des contrats en unités de compte, le gouvernement continue sur une autre voie en proposant une taxation annuelle des plus-values plutôt que d'attendre la sortie du contrat. Bercy propose également de taxer plus lourdement les gros contrats (au-delà de 1,3 millions d'euros). Aujourd'hui 30 millions de Français détiennent un contrat d'assurance vie, 30 millions d'épargnants qui ont choisi de privilégier ce placement financier pour se constituer un patrimoine transmissible, et sécuriser leur avenir une fois à la retraite. 64% des contrats ont déjà atteint au moins le seuil des 8 ans, levier qui permet aux assurés de bénéficier des meilleures conditions fiscales (7,5% de prélèvement libératoire forfaitaire en cas de rachat) s'ils souhaitent profiter de leur capital.

La FFSA (fédération française des sociétés d'assurance) a commandité un sondage (auprès d'Ipsos/Logica Business Consulting) qui a fait l'objet d'une publication dans le journal Le Monde le week-end dernier. Pour consolider leurs arguments, les assureurs utilisent aujourd'hui l'artillerie lourde, l'avis des épargnants qui ont, il ne faut pas l'oublier, tout pouvoir de décision sur l'orientation de leur placement. Sur les 958 personnes interrogées détentrices d'un contrat d'assurance, 59% pourraient se détourner de leur placement si l'Etat met en oeuvre sa réforme, et 24% (38% pour les ménages ayant des revenus mensuels inférieurs à 1 200€) seraient même prêtes à fermer leur contrat en cas de fiscalité moins avantageuse. 35% des sondés pourraient alors envisager d'autres solutions d'épargne. Avec 64% des contrats ayant dépassé le seuil des 8 ans, le risque d'une sortie pour ces mêmes contrats est potentiellement crédible.

Ce sondage ne fait que confirmer, si cela était nécessaire, l'intérêt des épargnants pour l'assurance vie : 66% considèrent ce placement comme un moyen "sûr et fiable" pour épargner, quand 61% y voient une source de revenus supplémentaires pour leur retraite. La fiscalité attachée à l'assurance vie est perçue comme intéressante pour 59%, alors que seulement 42% jugent sa rémunération correcte.

L'instabilité gouvernementale face à la réforme de la fiscalité du patrimoine induit un sentiment d'insécurité des ménages français qui ont déjà signifié leur veto en freinant leur décision d'épargner : l'assurance vie a subi un troisième mois de décollecte brute en février, soit -15% sur un an.