Assurance de prêt : le projet de résiliation pendant un an n'est pas satisfaisant pour l'AEC.
Lundi 9 décembre le ministre de la Consommation Benoit Hamon annonçait vouloir instaurer un droit à résiliation de l'assurance de prêt durant un délai de 12 mois après la signature du prêt. La position du gouvernement à propos de l'assurance emprunteur et la possibilité de résilier était très attendue. La loi Lagarde de septembre 2010 n'ayant pas produit les effets escomptés en matière d'assurance déléguée, le ministre espère que son projet va dynamiser la concurrence et mettre un terme au monopole des banques sur un marché très lucratif. Le meilleur moyen de rendre plus active cette concurrence serait d'autoriser l'emprunteur à changer de contrat et à opter pour un contrat moins onéreux à tout moment. C'est ce que pense le collectif Assurance Emprunteur Citoyen (AEC) qui se bat pour que l'assurance de prêt soit résiliable à tout moment.
Le statut juridique de l'assurance de prêt
L'AEC porte un jugement virulent sur le projet de Benoit Hamon. Qualifié de "régressif", il constitue selon lui une "habile stratégie de communication pro-consumériste". Quels arguments avance-t-il ? Le flou qui entoure le droit de changer d'assurance en cours de prêt est au coeur du débat : quand le droit à résiliation n'est pas explicitement interdit dans le contrat, il reste libre pour l'emprunteur. L'IGF (Inspection Générale des Finances) est elle même très prudente à ce sujet. Le rapport qu'elle a remis récemment au gouvernement souligne qu'un "faisceau d'éléments indique que l'assurance emprunteur est résiliable annuellement", mais en pratique, cette possibilité est limitée par le fait que l'emprunteur doit obtenir l'accord du prêteur et pas seulement de l'assureur pour pouvoir changer de contrat en cours de prêt. Même si les contrats d'assurance emprunteur ne font pas l'objet d'un régime spécifique dans le code des Assurances, on voit bien que leur situation juridique n'est pas clairement établie.
Pouvoir résilier annuellement
La proposition de Benoit Hamon prévoit qu'au-delà d'un délai de 12 mois après la signature du prêt la substitution de l'assurance ne sera possible que si l'offre de prêt l'autorise explicitement. Or pour l'AEC, ce qui n'est pas explicitement interdit doit être autorisé : l'assuré qui n'a pas été informé d'une interdiction à résilier doit pouvoir le faire. L'AEC réclame par ailleurs que le droit de résiliation en cours de prêt soit intégré dans la fiche standardisée d'information que l'organisme prêteur est tenu de remettre à l'emprunteur.
Frais de substitution
Le collectif craint en outre que la substitution de l'assurance de prêt donne lieu à des frais réclamés pour la rédaction d'un avenant pour changement d'assurance. Facturé entre 1% et 2% du capital restant dû comme c'est le cas pour les renégociations de crédit, cet avenant ouvrirait la liberté de changer d'assurance uniquement pour les emprunteurs en ayant les moyens. Un procédé qu'on peut rapprocher des frais de délégation que certaines banques n'hésitent pas à facturer et qui freinent bien évidemment la mise en oeuvre de la loi Lagarde. Le porjet de loi hamon prévoit toutefois que le changement doit se faire sans frais. Autre clarification demandée par l'AEC, la question des délais : 10 jours ouvrés durant lesquels la banque doit donner son accord ou son refus de substitution, et 10 jours encore pour informer l'assureur de l'accord de la banque. Le collectif réclame une procédure simple, identique à tous les contrats d'assurance, soit un préavis de 2 mois pour résilier annuellement.
L'examen en deuxième lecture du projet de loi Hamon dira si le délai d'un an pour résilier est retenu par le législateur. Rappelons que l'IGF avait préconisé un délai de 3 mois à compter de la souscription pour pouvoir résilier son contrat d'assurance de prêt et lui substituer un autre contrat présentant des garanties équivalentes. Ce laps de temps avait été retenu, car il est symétrique aux trois mois qui séparent la promesse de vente de la vente effective, et qu'il ne remet pas en cause l'équilibre financier des contrats tout en limitant les effets sur la démutualisation.

Par Francesco Romanello, le mardi 17 décembre 2013