Assurance emprunteur : le blocage des banques

Trois ans après l'entrée en vigueur de la loi Lagarde censée ouvrir le marché de l'assurance emprunteur, la concurrence peine à s'imposer. L'association UFC-Que Choisir porte un constat sévère sur ce produit indispensable pour l'obtention d'un crédit immobilier, toujours monopolisé par les banques. L'organisme dénonce les pratiques des établissements bancaires malgré les contraintes de la loi : la délégation d'assurance de prêt reste marginale, elle aurait même reculé depuis l'application légale.

Une loi inefficace
La délégation d'assurance emprunteur n'en finit pas de créer la polémique. Une nouvelle fois, le terrain témoigne de l'inefficacité de la loi Lagarde. L'enquête d'UFC-Que Choisir est édifiante (105 réponses reçues suite à un appel à témoignages lancé en juillet et août 2013). Elle met en lumière des pratiques bancaires, parfois en marge de la légalité, qu'un candidat à l'emprunt mal informé est bien en mal de combattre. Les banques cherchent par tous les moyens à imposer leur contrat groupe. L'atavisme bancaire perdure malgré la possibilité offerte à tout emprunteur depuis septembre 2010 de choisir librement son assurance de prêt. A condition de présenter un contrat externe aux garanties au moins équivalentes à celle du contrat de la banque. C'est ici que les banques jouent sur les mots et s'autorisent une interprétation des clauses dans leur propre intérêt, quand elles ne révisent pas les conditions du prêt ou facturent des frais supplémentaires pour délégation d'assurance, multiplient les exclusions ou retardent leur décision pour inciter l'emprunteur à souscrire le contrat interne sous peine de faire capoter le projet. Le marché est verrouillé par les banques : elles en détiennent aujourd'hui 86% contre 80% avant l'entrée en application de la loi Lagarde.

Des marges exorbitantes
Ce monopole tire les prix vers le haut. Les banques conservent ainsi des marges très élevées sur ce segment, anormales pour ce type de produit. En cause le manque d'efficience de la concurrence, alors que les offres individuelles pullulent et qu'elles permettent de faire jusqu'à 60% d'économie. Les banques captent une marge moyenne de 40% du total de la prime et jusqu'à 69% sur un contrat jeune emprunteur. Le marché représente une manne annuelle de 6 milliards d'euros, dont 2,2 milliards de marge qui tombent dans l'escarcelle des banques. Tout est fait pour ne pas perdre une once de ce marché juteux.

Imposer le droit à résiliation annuelle
UFC-Que Choisir interpelle les parlementaires pour que le projet de loi consommation entérine le droit à résiliation annuelle des contrats d'assurance de prêt. Cette possibilité est déjà inscrite dans le Code des Assurances, pour peu que la banque le stipule dans les clauses du contrat. Instaurer par voie légale un droit clair à résiliation annuelle résoudrait le problème des délais d'acceptation ou de refus de l'assurance déléguée, et empêcherait, pour tout crédit en cours, une révision du taux à la hausse.



Audrey Benzaquen

Par , le mercredi 4 septembre 2013

Partager cet article :
Les incontournables