L'assurance vie, victime des taux d'intérêts négatifs

L'assurance vie, victime des taux d'intérêts négatifs

Le niveau historiquement bas des taux obligataires fait le bonheur des emprunteurs...et le malheur des épargnants. Dans une interview au journal Les Échos, l'assureur Generali France prévient : la rémunération des fonds en euros des contrats d'assurance vie va être réduite. Les clients sont invités à privilégier d'autres supports.

Taux d'intérêts en territoire négatif

Le phénomène est inédit en France : les taux des emprunts d'État sont négatifs depuis juin dernier. Après un passage éclair à +0,1% durant la première quinzaine de juillet, le taux à 10 ans est en chute libre, atteignant -0,40% début septembre, pour "remonter" depuis à -0,20%. Toutes les durées jusqu'à 15 ans évoluent en terrain négatif à la faveur de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (taux directeur ramené à zéro, programme massif de rachat de dettes sur le marché, etc.). Une situation ultra favorable aux emprunteurs, mais pénalisante pour les épargnants qui risquent de voir la rémunération de leurs placements sur des fonds en euros fondre comme neige au soleil. D'autant que les nouvelles mesures annoncées par la BCE mi-septembre (taux de dépôt à -0,50%) n'ont fait qu'aggraver les choses. Conséquence, les prêteurs perdent de l'argent, les emprunteurs s'enrichissent (ou presque) et les épargnants se lamentent.

L'assurance vie dans la tourmente

Avec plus de 70% de ses actifs placés sur les marchés obligataires, l'assurance vie est la grande victime des taux bas. Certains assureurs comme Generali France n'hésitent pas à remettre en question leur modèle économique, s'appuyant sur les analyses du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF). Selon l'autorité française chargée de la surveillance du système financier français, "à moyen terme, un environnement de taux d’intérêt bas persistant met sous pression la rentabilité et plus généralement le business model du secteur de l’assurance". L'inquiètude pèse donc sur l'assurance vie et ses quelque 1 332 milliards d'encours des supports en euros (sur un total de 1 750 Md€). Pour Generali France, l'assurance vie n'a pas été conçue pour un environnement de taux bas...et cela fait vingt ans que les taux baissent.

La Fédération Française des Sociétés Anonymes d'Assurance (FFSAA) enfonce le clou, estimant que l'assurance vie est entrée en "territoire inconnu" et cela risque de perdurer. Si la confiance dans l'assurance vie est timidement maintenue, cette situation sans précédent oblige les assureurs à réviser le modèle d'épargne.

Encourager les unités de compte

La sentence est tombée : Generali France prévoit de baisser "très significativement" la rémunération offerte par ses fonds euros, dans des proportions non précisées pour le moment. Cette décision drastique doit s'accompagner de conditions renforcées pour investir sur des supports en euros. Même ambiance chez Allianz France qui considère le fonds en euros comme le "vestige d'un passé révolu où les taux d'intérêts étaient positifs". Il faudrait lui substituer un "produit qui soit durablement attractif dans le contexte financier actuel", qui "ne peut pas être seulement des fonds en euros avec davantage d'unités de compte (UC) ou d'eurocroissance". Allianz France a d'ores et déjà indiqué que les assurés voulant placer plus d'un million d'euros devront investir au moins 50% de cette somme sur les supports en UC.

L'écho est différent du côté de l'Afer, association française spécialiste en épargne retraite et assurance vie. Pour elle, le contexte des taux bas est passager, et ne doit pas dicter une stratégie en assurance vie. Sa confiance dans les fonds en euros est acquise, en porte-à-faux avec les positions de Generali. L'Afer rappelle que les réserves alimentées par une partie des bénéfices servent à offrir des rendements décents en cas de coups durs. En 2018, la rémunération moyenne des fonds en euros s'est établie autour de 1,8%.



Francesco Romanello

Par , le jeudi 3 octobre 2019

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