La Cour des Comptes épingle les pompes funèbres

La Cour des Comptes épingle les pompes funèbres

Dans son rapport annuel sur les dépenses publiques, publié le 6 février dernier, la Cour des Comptes évalue les dysfonctionnements dans différents secteurs et services (SNCF, hôpitaux, alimentation,...), dont les pompes funèbres. Une nouvelle fois, l'opacité des tarifs est en ligne de mire.

Pompes à fric !

Les pompes funèbres se portent bien ! Avec l'arrivée des baby-boomers dans la zone de forte mortalité et l'inflation des tarifs, le marché progresse au fil des années, générant plus de 2 milliards d'euros en 2015 contre 1,28 Md€ en 2000. Opérateurs publics et prestataires privés se livrent une concurrence farouche, vingt-cinq ans après la libéralisation du marché.

En janvier 1993, le monopole funéraire détenu par les régies municipales a explosé, autorisant tout client à choisir librement son prestataire pour l'achat de la tombe, le transport, l'inhumation ou encore les soins du corps. A l'époque, l'Insee prévoyait une envolée du marché de 45% d'ici à 2040 avec la fin de la génération du baby-boom de l'après-guerre. Avec une concurrence accrue et l'arrivée d'opérateurs privés, positionnés pour certains sur le discount, les prix auraient dû baisser. C'était oublié que les entreprises de pompes funèbres ont toutes un but commercial, chacune va essayer d'imposer la facture la plus lourde. D'autant qu'il est difficile pour la famille du défunt, déjà éprouvée par le deuil, de faire le tour des prestataires et de comparer les tarifs dans le délai de six jours imposé par la législation pour organiser des obsèques (hors dimanche et jours fériés).

Le secteur funéraire, un marché mal contrôlé

L'internet a aussi modifié le marché. En dix ans, le nombre d'agences est passé de 3 000 à 6 000, entraînant dans son sillage la disparation des agences de proximité indépendantes. Aujourd'hui, trois gros opérateurs se partagent le gâteau : PFG qui capte 20% du marché (125 000 obsèques organisées chaque année), Le Choix funéraire et Roc-Eclerc. A côté d'eux, des centaines de petits opérateurs indépendants. Malgré les économies d'échelle facilitées par cette concentration des acteurs, les prix n'ont pas baissé. Au contraire, ils ont augmenté deux fois plus vite que l'inflation. Le coût moyen des obsèques tourne actuellement autour de 4 000€ (hors pierre tombale et concession).

Dans son rapport, la Cour des Comptes dénonce cette envolée des prix, ainsi que la concentration du marché et le manque de transparence. Les Sages réclament un renforcement de la législation qui obligerait les opérateurs à fournir des devis-types, clairement détaillés et chiffrés pour permettre la comparaison.

Pourtant, depuis août 2010, toute entreprise de pompes funèbres est dans l'obligation de remettre un devis-type gratuit écrit, détaillé et standardisé afin d'offrir aux consommateurs des éléments de référence grâce à une terminologie et des rubriques comparables. Le document doit entre autres préciser le caractère obligatoire ou facultatif de chaque prestation, également les montants nets de tous les services, fournitures et prestations effectués, même ceux des entreprises tierces (culte, fleuriste, imprimerie, insertion presse,...). Et depuis janvier 2018, la réglementation impose aux opérateurs funéraires de mettre à disposition des familles un document officiel définissant l'objet et la nature des soins de conservation du corps. En cas de manquement, les consommateurs peuvent s'adresser par courrier à la Préfecture qui délivre les habilitations, à la commune concernée si le prestataire est une régie municipale, ou à la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) ou de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) s'il s'agit d'un problème de concurrence, de prix ou de tromperie. Bon courage !

On voit ici une fois encore que la conformité à la loi se constate éventuellement a posteriori et au détriment du consommateur, captif d'un marché en roue libre par l'absence de contrôle officiel en amont.



Hervé Labatut

Par , le jeudi 7 février 2019

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