Assurance vie : la concurrence active du Livret A.

Le conseil des ministres de mercredi dernier a confirmé une hausse progressive des livrets réglementés dès septembre. En entérinant une mesure phare promise par François Hollande durant la campagne présidentielle, le gouvernement Ayrault ravive les craintes des assureurs vie.

Le doublement du plafond du Livret A se fera en plusieurs phases. Courant septembre, le plafond sera rehaussé de 25%, passant de 15 300€ à 19 125€, puis a nouveau relevé de 25% avant la fin de l'année 2012. Dans la foulée, le plafond du LDD (livret développement durable) est immédiatement doublé, de 6 000€ à 12 000€. Le doublement définitif du Livret A se poursuivra en fonction des besoins.

Considéré à tort ou à raison comme le concurrent direct de l'assurance vie, le Livret A va encore plus accentuer le frein qui pèse sur la collecte en épargne longue. L'étalement de l'augmentation du plafond avait été demandé par les assureurs vie et les banques, mais chaque relèvement risque de prolonger l'hémorragie dont souffre l'assurance vie ; elle a perdu 4,7 milliards d'€ depuis le début de l'année, une érosion entamée en août 2011 et qui a fluctué au fil des mois. Dans un même temps, les épargnants français ont réaffirmé leur engouement pour l'épargne liquide, réglementée et défiscalisée, à savoir le Livret A et d'autres produits financiers à taux garantis (LDD, livret Bleu, LEP). L'année 2012 pourrait être une année record pour le Livret A ; la collecte nette en juillet atteint déjà 13,29 milliards d'€, dans la lignée des collectes exceptionnelles enregistrées en 2008 et 2009. L'encours global du Livret A et du LDD atteint désormais 302 milliards d'€. Ces deux livrets ont vu leur taux de rémunération inchangé au 1er août, maintenu à 2,25% nets d'impôt.

Les banques voient également d'un mauvais oeil le régime de faveur accordé au Livret A, et craignent que l'augmentation des plafonds des livrets réglementés n'entraîne un transfert d'épargne depuis leurs propres livrets bancaires. Le succès de l'épargne liquide s'est forgé avec la crise de l'euro. Le grave problème des dettes souveraines a instillé aux épargnants une défiance vis-à-vis de l'assurance vie, déjà fragilisée par les rendements en perte de vitesse. Le besoin de liquidités a précipité les chiffres de la collecte dans le rouge et favorisé les produits financiers plus souples avec une disponibilité immédiate de l'épargne.

Centralisée par la Caisse des dépôts, l'épargne détenue sur les quelque 60 millions de Livrets A est utilisée pour financer des secteurs d'utilité collective. L'assurance vie est une épargne longue, destinée en partie à soutenir l'économie française et à financer la dette de l'Etat. Pour l'heure, le gouvernement choisit de donner un coup de pouce au logement social. Rappelons au passage que seuls 8% des Livrets A ont atteint leur plafond, l'encours moyen étant de 3500€. L'effort de communication autour du doublement du plafond du Livret A voudrait faire passer l'évènement comme une réelle mesure structurelle, hors il devrait avoir un faible impact étant donné le profil des clients du Livret A.Le problème de l'assurance vie n'est pas le Livret A.



Audrey Benzaquen

Par , le jeudi 23 août 2012

Partager cet article :