Assurance vie : les épargnants toujours frileux.
La chose est entendue depuis plusieurs mois, les épargnants délaissent l'assurance vie. Les 6 mois de décollecte successive témoignent des inquiétudes des détenteurs d'un contrat d'assurance vie quant à leur placement préféré, mais également quant au contexte ambiant peu favorable à ce type de thésaurisation. Les épargnants se tournent vers des produits financiers plus souples, même si le rendement est moindre. Cela aurait pu être un paradoxe, mais les assureurs ne se plaignent pas du mouvement de décollecte qui affecte l'assurance vie. Il leur permet, au contraire, de stabiliser leurs actifs à l'heure où les marchés financiers rendent l'investissement hasardeux.
Les particuliers ont retiré 2,1 milliards d'euros de leurs contrats d'assurance vie depuis janvier 2012, une décollecte entamée à l'automne dernier qui s'est modérément calmée en février pour reprendre les mois suivants. Le mois de mai dernier est le plus mauvais mois de ce premier trimestre avec une collecte négative à -1,5 milliards d'euros. La crise de la dette, ou plutôt des dettes souveraines des Etats de la zone euro, a fragilisé le statut de l'assurance vie dans l'opinion des épargnants. A juste titre, puisque l'exposition des compagnies aux dettes toxiques est réelle, tout en étant contenue et maîtrisable. La baisse des rendements depuis ces 5 dernières années et le recul du pouvoir d'achat des ménages, obligés de trouver une nouvelle trésorerie, ont fait le reste. Les épargnants ont privilégié les placements plus liquides, livrets réglementés (Livret A et LDD) et livrets bancaires proposant des taux boostés sur une courte durée.
Il convient par ailleurs de rapprocher le recul de l'assurance vie du marché immobilier. Les deux sont liés. Les retraits des contrats d'assurance vie durant la fin de l'année 2011 ont été en partie engendrés par un besoin de financement de projets immobiliers précipités pour contrecarrer la réforme des plus-values immobilières. Aujourd'hui la demande s'est tarie, notamment du côté des seniors. En vendant leur bien pour acheter un logement plus petit, ils grossissaient leur capital assurance vie en y plaçant la plus-value.
Le ralentissement de la collecte n'est pas défavorable aux assureurs. Les sommes collectées étant moindres, les difficultés pour les placer se réduisent. La crise de la dette n'est toujours pas résolue et la chute des marchés financiers rend très complexe le choix des placements. Les fonds en euros représentent 80% des contrats d'assurance vie, ces fonds étant largement investis sur les obligations d'Etat de la zone euro. L'épée de Damoclès qui plane sur la stabilité de certains Etats, Italie et Espagne en tête (après le choc de la Grèce) oblige les compagnies à déployer leurs actifs différemment. Les obligations souveraines ne représentent plus qu'entre 20% et 35% de leurs portefeuilles contre 35% à 60% il y a peu, un écart qui profite aux obligations d'entreprises. Ce changement de politique pourrait être bénéfique aux rendements de l'assurance vie en les rehaussant en moyenne autour de 3,3% pour l'année 2012.

Par Francesco Romanello, le mercredi 27 juin 2012