L'épargne des Français : des niches fiscales incohérentes.

Le récent rapport de l'IGF (inspection générale des finances) qu'a réussi à se procurer le journal Les Echos porte une critique très appuyée vis-à-vis de la politique du gouvernement en matière des revenus de l'épargne financière. En mettant en lumière l'incohérence des dispositifs fiscaux destinés à favoriser l'épargne, l'IGF met le gouvernement face à sa gestion des niches fiscales qu'il prévoit de raboter pour dégager une économie de 10 milliards d'euros.

L'état français cherche à favoriser l'épargne pour, d'une part, inciter les Français à assurer leur avenir à l'heure où le régime par répartition des retraites s'essouffle, et d'autre part, pour soutenir l'économie et les entreprises. Le rapport de l'IGF critique sans ambages "la profusion" de dispositifs fiscaux accumulés au fil du temps, pour lesquels aucun logique ni cohérence n'est identifiable. Une cinquantaine d'exonérations fiscales et sociales existe aujourd'hui sur les revenus de l'épargne pour un coût total annuel de 11,5 milliards d'euros. Un gâchis pour l'IGF qui dénonce une volonté politique détournée de ses objectifs prioritaires (épargne retraite et financement des PME) et les effets pervers d'une vingtaine d'avantages fiscaux qui se contredisent pour aboutir à des placements limités sur des supports demandeurs (actions). L'IGF rappelle que l'état soutient tout type de placement sans logique apparente et qu'il lui faudrait au contraire se concentrer sur les objectifs prioritaires aujourd'hui et à terme avec une fiscalité beaucoup plus lisible.

Les deux produits d'épargne pointés du doigt sont l'assurance vie et l'épargne salariale. Un des placements préférés des Français après le Livret A -pour une finalité très différente-, l'assurance vie a pour objectif principal le renfoncement des fonds propres des entreprises et le financement de l'Etat. Cela ne peut se faire que pour les placements en actions, qui sont minoritaires face aux placements en euros, sans risque pour l'épargnant. Or les avantages fiscaux sont identiques quel que soit le choix du support. Le gouvernement pourrait lors travailler sur un nouveau dispositif fiscal plus incitatif pour les contrats d'assurance vie multisupports. L'idée de déplacer l'échéance des contrats de 8 à 12 ans fait aussi son chemin, mais ce serait incontestablement pénaliser plus encore ce produit financier déjà partiellement bloqué avec la réforme des taux garantis. Quant à l'épargne salariale, l'IGF souligne un mouvement de substitution par rapport au salaire, ce qui grève les finances de l'Etat en réduisant les charges sociales dues par les entreprises : en 10 ans les sommes versées au titre de l'intéressement ont augmenté de 50%, quand la masse salariale n'a pour sa part grossi que de 40%. C'est le noeud gordien de la politique sociale : inciter les entreprises et les salariés à financer eux-mêmes les retraites, mais augmenter dans un même temps les recettes fiscales.

On connaît l'instinct naturel des Français pour l'épargne, instinct d'autant plus amplifié que la crise économique persiste depuis près de 2 ans. Le rapport dirait-il en substance que les Français seraient quoiqu'il arrive portés à thésauriser, quand bien même le gouvernement ne leur donnerait aucun avantage fiscal ? L'Etat a entre ses mains un rapport circonstancié qui tombe à point nommé pour trouver des solutions à la réduction du déficit public.



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