Hospitalisation : des restes à charge très inégalitaires

Hospitalisation : des restes à charge très inégalitaires

Dans l'édition 2019 de son Observatoire, la Mutualité Française s'intéresse aux restes à charge supportés par les assurés alors que la réforme du 100% se met en place progressivement. Elle constate que les mutuelles ont un rôle majeur dans la couverture des dépenses de santé, en particulier celle des frais hospitaliers, sources de restes à charge élevés et très variables selon les patients et leur lieu d'habitation.

Le rôle important des mutuelles dans la prise en charge des dépenses hospitalières

D'ici 2021, la réforme 100% Santé doit permettre à chacun d'avoir accès à des équipements sans reste à charge (RAC) en optique, prothèses dentaires et auditives, après intervention de la Sécu et de l'organisme complémentaire. Pour Thierry Baudet, président de la Mutualité Française*, cette réforme "ne règle pas 100% des restes à charge". L'Observatoire montre que, contrairement à une idée largement répandue, les dépenses d'hospitalisation ne sont pas intégralement supportées par la Sécurité Sociale, elles représentent d'ailleurs 24% des remboursements des organismes complémentaires, devenant ainsi leur premier poste de prise en charge. En comparant l'évolution des dépenses de santé (y compris les dépenses hospitalières) entre 2001 et 2017, l'Observatoire constate qu'elles progressent quasiment au même rythme que les remboursements de la Sécu, soit respectivement +3,2% et +3,3% par an. En revanche, le décalage est net avec la prise en charge par les complémentaires santé. Si ces dernières ont du assumer, tous postes confondus, une augmentation de leurs remboursements de 3,7% par an, les dépenses d'hospitalisation prises en charge se sont accrues de 5,3% chaque année. Le parallèle avec l'évolution du reste à charge final des Français est parlant : il est de +1,3% par an pour l'ensemble des dépenses de santé et de +0,9% pour les seuls frais hospitaliers. L'intervention des mutuelles est donc primordiale pour diminuer les restes à charge d'une manière générale et tout particulièrement en hospitalisation.

Inégalités de restes à charge

Thierry Baudet souligne "l'impact social" des organismes mutualistes dont le rôle est "déterminant et croissant" pour réduire la facture des Français, d'autant que la population qu'ils protègent est plus âgée que la moyenne. Les chiffres témoignent des inégalités dues à l'âge et à la localisation :

  • avant remboursement de la mutuelle, le RAC atteint 1 200€ par an pour les personnes de 80 ans et plus, soit près de 2 fois plus que la moyenne (652€) ; 
  • 5% des adhérents mutualistes (1,8 million) supportent des RAC 5 fois supérieurs à la moyenne avec un montant moyen de 3 680€ par an (toujours avant intervention de la mutuelle);
  • le RAC moyen est très variable selon les départements, passant de 404€ en Mayenne à 706€ à Paris, soit +70%.

Une fois déduite la prise en charge complémentaire, un senior de 80 ans et plus supporte 255€/an. La comparaison s'impose avec les autres classes d'âge pour démontrer que les mutuelles permettent de réduire les écarts. Après intervention de la complémentaire santé, le RAC est de 257€/an pour un assuré entre 50 et 59 ans, de 251€/an pour les 60-69 ans et de 272€/an pour les 70-79 ans. Quand la mutuelle rembourse 499€ par an à une personne de 52 ans, elle offre une prise en charge moyenne de 944€ à un senior de 80 ans.

Hospitalisation : un reste à charge plus inégalitaire

L'Observatoire s'est attardé sur les dépenses hospitalières, pour lesquelles les RAC sont encore plus déséquilibrés avant remboursement des mutuelles :

  • le RAC en hospitalisation atteint 880€/an pour une personne de 80 ans et plus, soit plus de 2 fois plus que la moyenne (396€) ;
  • il grimpe à 4 090€ pour 5% des adhérents mutualistes, qui concentrent à eux seuls la moitié du RAC hospitalier ;
  • d'un département à l'autre, le RAC hospitalier varie du simple au quadruple (115€ dans le Haut-Rhin contre 428€ dans l'Orne).

Ces écarts sont imputables en grande partie aux différences tarifaires : 232€ pour un chirurgie de la cataracte en clinique privée dans les Ardennes contre 671€ à Paris ; 118€ pour une coloscopie dans l'Ariège contre 273€ dans le Rhône.

Et l'Observatoire de revenir sur un préjugé tenace : être couvert par le statut ADL (Affections de Longue Durée) ne protège pas d'un RAC élevé en hospitalisation. Avant intervention de la mutuelle, ce dernier est quasiment deux fois plus important pour un patient en ADL (390€) que pour les autres assurés (208€).

La contribution des organismes complémentaires dans la réduction des inégalités est de nouveau prouvée par les chiffres. Ils prennent en charge 72% du RAC toutes dépenses de santé confondues, et 90% du RAC hospitalier. Dernier constat : les mutuelles couvrent des dépenses de santé plus élevées que celles prises en charge par les sociétés d'assurance et les institutions de prévoyance, notamment sur le poste hospitalisation. Entre 2001 et 2017, la part des dépenses hospitalières dans le volume de remboursement des mutuelles est passée de 14% à 20%. Elle est de 18% pour les compagnies d'assurance et de 14% pour les institutions de prévoyance. 



*première fédération mutualiste avec 563 mutuelles adhérentes dont 283 mutuelles santé



Gerard Mihranyan

Par , le vendredi 11 octobre 2019

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