Mutuelle : une proposition de loi relative au droit de résiliation à tout moment

Mutuelle : une proposition de loi relative au droit de résiliation à tout moment

La résiliation à tout moment de l'assurance santé complémentaire est sur les rails législatifs. Vendredi dernier, le groupe LREM a déposé une proposition de loi visant à permettre aux assurés de résilier leur contrat quand ils le souhaitent à l'issue d'une année de souscription.

Faciliter le changement de mutuelle 

Malgré l'opposition des organismes d'assurance maladie complémentaire, en particulier des mutuelles et des institutions de prévoyance, le gouvernement ne renonce pas. Le 6 février dernier, Gilles Legendre, le président du groupe LREM à l'Assemblée Nationale, a déposé une proposition de loi en vue d'étendre le bénéfice de la résiliation infra-annuelle introduite par la loi Hamon du 17 mars 2014 aux souscripteurs de contrats complémentaires santé. Porté par plus de 300 députés de la majorité présidentielle, le projet vise à simplifier la résiliation des mutuelles et autres assurances santé complémentaire, que le contrat soit individuel ou collectif. Actuellement, un assuré ou un adhérent est soumis au principe de tacite reconduction s'il ne résilie pas son contrat dans les délais. Même si la loi Chatel oblige les organismes complémentaires à respecter des contraintes d'information, le processus de résiliation manque de fluidité. Cette mesure de simplification, à l'image de ce qui se fait déjà en assurance auto et habitation, devrait permettre aux assurés de bénéficier d'une concurrence accentuée en matière de couverture santé complémentaire, un produit qui, à défaut d'être obligatoire (hors mutuelle collective en entreprise), n'en demeure pas moins indispensable et, à ce titre, un poids dans le budget des ménages.

Le texte indique que la mesure devra s'appliquer "aux contrats conclus ou tacitement reconduits à compter d'une date prévue par un décret en Conseil d’État, et au plus tard à compter du 1er décembre 2020". Ce n'est donc plus le 1er janvier 2020, comme initialement prévu par l'exécutif. Pour mémoire, un amendement visant la résiliation infra-annuelle des contrats de santé complémentaire avait été déposé au Sénat fin janvier dans le cadre de l'adoption de la loi Pacte. Le gouvernement avait retiré son projet au prétexte d'une invalidation du texte par le Conseil Constitutionnel. On peut légitimement avancer que la pression des organismes complémentaires avait atteint son but. Court répit néanmoins, car une dizaine de jours aura suffi au groupe LREM pour revenir à la charge avec le bon vecteur législatif. Les initiateurs du projet de loi contournent le problème de constitutionnalité en rédigeant un texte spécifique visant à étendre le champ de la loi Hamon, qui ne saurait être qualifié de cavalier législatif. 

Assurance santé complémentaire = 36 milliards de cotisations en 2016 !

A l'annonce du projet en janvier, les organismes complémentaires avaient vivement réagi, le taxant de "fausse bonne idée", imposée au mépris de toute concertation préalable. Après s'être fait taper sur les doigts par le président Macron en décembre dernier, les voilà de nouveau piqués au vif. Quels sont leurs arguments contre la résiliation infra-annuelle ? un risque de démutualisation au détriment des assurés les plus fragiles et des effets inflationnistes en totale opposition avec l'objectif affiché. La résiliation à tout moment à l'issue d'un an de cotisations engendrerait selon eux une volatilité du marché à l'instar de ce qu'ont vécu les assurances auto et habitation avec l'introduction de la loi Hamon.

Une plus grande souplesse accordée aux assurés pourrait-elle mettre en péril le marché de l'assurance santé complémentaire, un immense gâteau que se partagent les mutuelles, les assureurs généralistes et les institutions de prévoyance ? Les premières se taillent la part du lion avec 54% du marché et restent attachées à la spécialisation du risque santé et à son maintien en dehors de toute sphère marchande. Elles dénoncent une plus grande porosité entre la protection sociale non-lucrative et les assurances du secteur lucratif, entretenue par les politiques publiques de ces dernières années.



Hervé Labatut

Par , le lundi 11 février 2019

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