Santé : quand elle devient trop chère.

Encore aujourd'hui le modèle social français est un des plus protecteurs, mais les enjeux économiques sont tels que le recours au secteur privé est désormais incontournable. Tordons le cou à une certitude franco-française : notre système de protection sociale n'est pas le meilleur du monde. Aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et dans les pays scandinaves, le taux de renoncement aux soins seraient moins important et des efforts notables sont faits pour la prise en charge des soins dentaires notamment. Le reste à charge des assurés français est tout de même le plus faible avec celui des Néerlandais. L'explication vient du rôle joué par les organismes complémentaires dans ces deux pays, où ils prennent en charge 13% des soins.

Le reste à charge des assurés français est en moyenne de 9,4%, taux qui augmente depuis plusieurs années et qui ne risque pas de baisser. La Sécurité Sociale prendrait en charge 75% des dépenses de santé, les mutuelles et autres organismes complémentaires 13%. Comme toutes les moyennes, ces chiffres cachent des disparités flagrantes quand on aborde le coûts des soins en dentaire et en optique. Les remboursements par la Sécu sont dérisoires, l'écart entre les tarifs conventionnés et les coûts réels abyssal. Cela entraîne immanquablement un renoncement aux soins surtout pour les plus fragiles et les jeunes, à savoir ceux chez qui l'absence de CMUC ou de mutuelle est la plus forte. Les personnes ne bénéficiant pas de protection complémentaire sont deux fois plus nombreux à renoncer aux soins les plus onéreux, à savoir ceux que la Sécu rembourse le moins (30,4% contre 15,3% pour ceux qui disposent d'une mutuelle). Le fait de devoir avancer les frais est également un facteur entraînant le renoncement à consulter.

Autre facteur aggravant : les dépassements d'honoraires. Ils concernent avant tout les spécialistes qui sont 4 sur 10 à exercer en secteur 2, c'est-à-dire à pratiquer des honoraires libres. On peut légitimement avancer que les assurés ne sont pas tous égaux devant l'accès aux soins, puisque dans certaines zones, dans les grandes agglomérations en général, il est quasiment impossible de trouver un praticien spécialiste en secteur 1 où les tarifs conventionnés sont la règle. Sans mutuelle, comment faire ? Mais même avec une assurance complémentaire, les dépassements d'honoraires ne sont pas systématiquement remboursés : seuls les contrats ayant des garanties élevées prennent en charge une partie des dépassements d'honoraires. Mais qui dit garanties performantes dit cotisations élevées.

En marge de l'élément financier, ajoutons l'inégale répartition des médecins sur le territoire et les délais d'attente trop longs pour obtenir un rendez-vous, et l'on complète la liste des raisons qui poussent à renoncer aux soins. Les zones rurales sont les premières touchées. Certaines sont de véritables déserts médicaux. La Picardie est la région où la densité médicale est la plus faible. Quant à l'allongement des délais d'attente pour obtenir un rendez-vous, une personne sur 3 aurait déjà eu des difficultés pour être reçu par un généraliste et plus de 4 sur 10 par un spécialiste. Cela induit un renoncement aux soins pour certains et pousse même un quart des Français à se rendre directement aux urgences pour être soigner.



Francesco Romanello

Par , le jeudi 16 février 2012

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